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Luciole Media
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12 mai 2008

L'obsession Hitler

Encore 925 ans d'expiation

En lançant la thématique de la culpabilité allemande, je ne pensais pas tenir une semaine. Mais c'était en oubliant que le IIIe Reich fêtait les 75 ans de son avènement cette année. Je suis tombée, par un parfait hasard, sur l'article d'un Allemand d'origine juive polonaise,
Henryk M. Broder, qui dénonce justement le tapage intellectuel autour du passé nazi de l'Allemagne. Hitler avait auguré un Reich millénaire - les Allemands n'ont donc plus que 925 ans pour purger leur faute, annonce Broder.

Il est vrai qu'aucun autre personnage historique n'aura fait couler autant d'encre. Osons la comparaison avec la Bible, autre réservoir d'histoires inépuisable : eh bien, on ne tourne pas un film sur la Bible toutes les deux semaines ! Dans le monde académique, Hitler décroche aussi le pompon, avec les milliers de livres, de thèses et autres travaux de recherche à son sujet. Le scénario Hitler a déjà été réécrit dans toutes ses potentialités : si Hitler avait gagné la guerre, si Hitler n'avait pas été un peintre raté...

Broder s'arrête encore sur la fâcheuse tendance qu'ont les Allemands à vouloir diaboliser Hitler à tout prix. Pour lui, il faut y voir non pas une droiture impitoyable vis-à-vis de leur passé, mais plutôt la recherche de circonstances atténuantes : ce n'est pas un homme ordinaire qui les a galvanisés, c'est un fou, un bourreau, un démon.

Pour Broder, les Allemands n'ont pas reçu de châtiment matériel à la hauteur de leur faute. Il écrit (et je le suis moins sur ce point) que les souffrances des Allemands sur le front russe ou sous les bombardements de Dresde, de Hambourg et de Cologne n'ont pas été suffisantes pour les racheter. Je veux bien qu'on fasse une psychanalyse à contenu chrétien, en comparant la culpabilité allemande avec la culpabilité entretenue notamment par l'Eglise catholique. Mais de là à justifier les bombardements des alliés sur des villes allemandes remplies de civils, il y a un pas à ne pas franchir.

Je crois toutefois que Broder s'en limitait à un parallèle symbolique avec la faute originelle. Dans ce sens, il n'aurait pas tout à fait tort : la culpabilité qui pèse aujourd'hui encore sur le peuple allemand est une malédiction prométhéenne dans toute sa splendeur. La peine n'étant pas complètement expiée, le coupable est condamné à ne jamais trouver le repos éternel.

Source :
"Pourquoi les Allemands n'en ont pas fini avec Hitler", Henryk M. Broder, Courrier International n° 912 du 24 au 29 avril 2008 (traduit du Spiegel : "Alles Adolf")

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Commentaires
L
Comme vous le savez, j'ai beaucoup traité ce sujet et bon je voudrais juste ajouter qu'en réalité, à la sortie de la Guerre les dirigeants allemands qui ont fait leur mea clupa ont créer une rupture avec la société civile, parce que cette dernière n'éprouvait peu, voire pas de culpabilité, pèuisqu'avait également beaucoup souffert et que l'antisémisime biensûr ne s'efface pas du jour au lendemain. Hitler avait en plus du massacre des juifs et autres, essayé de créer des maisons de reproduction aryenne, et pleins d'enfants ont du chercher leur parents etc. Le peuple lui-même avait été tellement touché que le discours international a du se transformer petit à petit pour influencer le discours national... j'ai pas le temps de chercher les références, mais si ça intéresse j'ai tout!
S
A nouveau un article extrêmement intéressant! J'ai toujours été intrigué... Comment moi même j'aurai géré un tel passé pour mon pays? en aurais-je eu honte? ou me serais-je tout simplement pas du tout senti concerné?<br /> Il est clair qu'il doit être parfois difficile d'assumer son amour pour son pays dans de telle condition...
K
Je te félicite de nous présenter des travaux ou articles allemands, premièrement parce que malgré 7 années d'études, je ne maitrise plus cette langue et deuxièmement parce que ce peuple a un passage historique horrible certe mais il n'a pas à le payer aujourd'hui encore. J'ai d'excellents souvenirs dans ce pays et je trouve qu'on devrait d'avantage le mettre en avant.
R
Je suppose que tu as vu le film "La chute" qui donne une image de Hitler peu habituelle... Presque humaine...
M
Je trouve la parallèle avec la culpabilité infligée par l'Église catholique assez pertinente dans le sens où même si le nazisme a été surpassé en Allemagne depuis longtemps et que beaucoup de gens ne vont plus à l'Église, finalement la culpabilité est encore ancrée dans la mémoire (cellulaire) des gens... Ce sont comme des schèmes de pensée qui se transmettent, à travers les générations, en s'atténuant tout doucement...<br /> Par ailleurs, je viens d'apprendre dans une conversation avec une allemande, qu'ils ne chantent pas leur hymne national, qu'ils n'osent pas le chanter !! Il y a peu de patriotisme allemand...
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